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«Par chez nous, les têtes ont tant été tournées, qu’il aura fallu le cinéma pour savoir à nouveau que tout visage est beau, émouvant, plein d’un mystère profond, pourvu qu’on le regarde. Mais ils croient, dans leur folie, que cette façon dont ils ont vu est la seule de voir. Aussi, j’ai parfois l’impression que les visages de la foule portent comme une gifle ce défaut d’atten- tion qui les touche.»
David Bosc, Sang lié, 2005.
Sommes-nous devenus invisibles les uns aux autres ? Incapable de se voir sans passer par le prisme d’un écran, centrés sur nos claviers de smartphones ? Comment communiquons-nous ? Dans la nouvelle série de vidéos du plasticien suisse Peter Aerschmann, une foule bigarrée de personnes, des plots de signalisation cachant leur visage, tapotent sur leur téléphone ou se prennent en photo à l’aide d’une perche à selfies. Dans une autre, des silhouettes recouvertes de draps blanc errent fantomatiquement sur un fond noir. Leurs airs de pleurants –à l’image de ceux sculptés au pied des tombes bourguignonnes du XVème siècle –ajoutent du drame au tableau. « Sommes-nous de plus en plus détachés de nous-même ? » s’interroge-t-on devant les vidéos de Peter Aerschmann. Les modes de vie urbains et dans l’ultra communication ne sont-ils pas un frein à nous-même ? Mais qu’est-ce qui fait de nous des êtres humains ? Ces questions, Peter Aerschmann a commencé à se le poser il y a trois ans, quelques mois à peine avant les débuts de la pandémie : la vidéo « I MISS YOU » évoquait déjà cette distanciation avec nos congénères, en contradiction avec ce mode où tous les moyens sont mis en œuvre pour faciliter l’interactivité. N’est-il pas plus simple de communiquer avec une personne à l’autre bout de la planète plutôt que d’avoir une conversation avec son ou sa voisine de bus ? Sortes d’univers mentaux, les vidéos de l’artiste suisse sont des reconstructions virtuelles d’éléments qu’il est allé filmer ou photographier dans le monde réel. Ces éléments, ensuite isolés de leur contexte, progressent dans un environnement neutre, linéaire : c’est alors au spectateur d’interpréter, de penser une possible narration. Ainsi, que raconte la vidéo El Tiburon ? On y voit un une foule en pleine festivités de carnaval, les corps se touchent, semblent mêlés les uns aux autres. Malgré cette apparente promiscuité, la foule est anonymisée, les visages floutés et les carnavaliers deviennent invisibles les uns aux autres.
Vernissage de l'exposition Invisible : samedi 29 janvier 2022, 17h00 - 21h00
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More coming soon !
Opening of the exhibition Invisible : Saturday January 29th 2022, 5pm - 9pm
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